Le contexte est inopportun, très mal choisi : en dépit de la crise sanitaire qui s’est transformée en crise économique et sociale, aussi dévastatrice que le virus lui-même, le syndicat des médecins du secteur privé se permet d’annoncer une augmentation considérable des consultations médicales. Une augmentation qui s’étalera sur deux phases au cours de l’année 2021, soit aux mois de janvier et de septembre.
Il devient évident que la gouvernance du système de santé dans le secteur privé prend de moins en moins en considération l’inégalité sociale. Au moment où la capacité d’accueil des établissements hospitaliers publics est dépassée, le citoyen au revenu limité — et même moyen — est incapable de supporter la charge des consultations et des hospitalisations privées. Les frais qui en découlent dépassent de loin ses ressources financières. L’accès aux soins médicaux n’est plus à la portée de tous.
S’il est un domaine qui demande et exige un contrôle urgent, c’est bien celui de la santé dans le secteur privé. Prescriptions souvent abusives et non justifiées médicalement, prolongement démesuré de la durée du séjour… Même si le gain financier est toujours cherché, l’on oublie qu’il s’agit aussi et à l’évidence de protéger la dignité de l’homme et de sauver des vies humaines. Les dérives déontologiques sont graves. Elles n’ont plus de limites.
Autre élément qui pose question : le malade n’est plus considéré comme un patient, mais plutôt comme un client qui entre dans la trilogie rentabilité, chiffre d’affaires et taux d’occupation. Les fraudes qui se succèdent montrent l’ampleur du mal. Les exemples de patients victimes d’arnaque sont nombreux. Aussi les plaintes déposées par des patients se considérant lésés sont-elles devenues fréquentes. En l’absence de méthodes de contrôle rigoureuses, les malades continueront à subir, la mort dans l’âme, les dérives de beaucoup d’établissements privés, et au prix fort.
Il n’est pas facile de dégager une logique de fonctionnement cohérente et pertinente dans ce qui est entrepris dans les établissements de santé privés. Parfois, cela dépasse le cadre purement sanitaire pour devenir une obstination matérielle. D’ailleurs, il est souvent difficile d’évaluer la qualité des soins fournis, encore moins le coût des honoraires du médecins et du staff médical, la plupart du temps non justifiés. Le prix payé dépasse de loin celui qu’un patient aurait payé dans le secteur public. Certes, l’accueil et l’hospitalisation sont meilleurs, mais pas toujours la compétence. Et le tableau n’est pas toujours aussi blanc. La médecine business a fini par l’emporter sur le serment d’Hippocrate. A l’analyse des différentes intrigues, il est évident qu’il y a beaucoup de points d’interrogation auxquels on ne semble pas pouvoir trouver de réponses, encore moins y faire face. Mais on n’est pas censé ignorer les réelles motivations des uns et des autres. Les intérêts qui motivent, qui conditionnent selon des considérations beaucoup plus matérielles qu’humaines…